Michel Mohrt : un seigneur des lettres !

Michel Mohrt : un seigneur des Lettres s'en est allé !

Le romancier et académicien Michel Mohrt est décédé, à l'âge de 97 ans ce mois d'août 2011. L'écrivain était né à Morlaix en 1914. Cet écrivain de la mer, également spécialiste du sud des États-Unis, aimait revenir à Locquirec (29). Un "Faulkner breton" dira en hommage Frédéric Mitterrand.

Il ne fermera plus les volets de Ker-Velin, sa maison marine de Locquirec. Hier, à Paris, MichelMohrt a pris le large. «La bâtisse appartenait toujours à la famille, il y avait passé quelques jours en juillet, mais il était très fatigué et il était peu sorti», confiait, hier, Gwénolé Guyomard, maire de la cité trégorroise.

Avec Michel Mohrt, c'est un précipité de la littérature française du XXème siècle qui vient de mourir. Si, à la différence de son ami MichelDéon, il était un peu moins lu aujourd'hui, il était le symbole d'une «écriture hyperclassique, qui allait au-delà du style régionalisant», comme se rappelle Agnès Le Brun, maire de Morlaix. «Je l'avais simplement croisé il y a plus de dix ans, il était très âgé et se faisait rare dans la région, même s'il y avait des attaches», indique-t-elle.

Michel Mohrt était né dans une famille commerçante de Morlaix, à deux pas du viaduc, en 1914. Après des études de droit à Rennes, il embrassa la profession d'avocat à Morlaix en 1937, ne cachant pas un compagnonnage idéologique avec l'Action Française, matrice intellectuelle de l'extrême droite de l'époque, ce qui le conduira à séjourner à Vichy durant une partie de l'Occupation.

En 1947, il s'installe en Amérique, enseigne dans plusieurs universités prestigieuses au Canada et aux États-Unis et devient un grand spécialiste de la littérature anglo-saxonne, avant d'intégrer, en 1952, la maison Gallimard comme responsable des traductions. Michel Mohrt délivre en ces années-là une œuvre prolifique, marquée par l'univers de la mer. «La prison maritime» obtient en 1969 le grand prix de l'Académie française, qui accueille Mohrt en son sein en 1985. «Relisez ce livre, conseille Erik Orsenna, c'est un livre étonnant, avec un côté adolescent, bourré de force, de camaraderie et d'aventure».

Le sherpa de Mitterrand, l'autre Breton de l'Académie, aura partagé une complicité étonnante et sincère avec un homme qui, dans «Le Tombeau de la Rouërie», en 2000, rendait un hommage discret à ses amis des années 40. «J'ai l'impression qu'il était resté sur les mêmes racines idéologiques, mais on n'en parlait pas», indique Erik Orsenna. «Je l'ai connu bien avant l'Académie, poursuit-il. Lui et moi étions nourris de Bretagne. Lui était de là et moi d'adoption. Puis nous avions cette passion de la mer et celle de la littérature américaine. C'est très étrange que deux fous de Bretagne, l'un de gauche, l'autre de droite, se soient retrouvés dans cette passion pour Faulkner». Erik Orsenna évoquait encore, hier soir, avec émotion ses rencontres annuelles avec son confrère. «Chaque été, nous nous réunissions à Locquirec en compagnie de Jacqueline de Romilly (académicienne et grande helléniste, ndlr), qui y venait en villégiature. Nous avions un rituel: Michel Mohrt et moi-même racontions la Manche à cette femme de la Grèce en lui disant que la Méditerranée n'avait pas le monopole de la beauté. Je garderai en mémoire ces marches à petit pas sur le littoral locquirécois. Je tenais à bout de bras à ma droite Jacqueline de Romilly, tandis qu'étrangement, Michel Mohrt marchait à ma gauche»...

Article de Stéphane Siohan (Le Télégramme.com).

Michel Mohrt (28 avril 1914 – 18 août 2011.)

Michel Mohrt fit paraître en 1942 un ouvrage sur Henry de Montherlant : « Montherlant, homme libre », qui demeure l'une des meilleures études d'ensemble sur la personnalité et l'œuvre du grand écrivain.

Editions de la Table Ronde. (Réédition 1989).

Vidéo : « Mon ptit garcon » une chanson de Michel TONNERRE chanté ici par le groupe les P'tit Chanteurs à la Gueule de Bois...

Locquirec, rivages et images de vagues, en la mémoire de Michel Mohrt.